LE FOL UNIVERS DE GASTON LEBRAVE
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 Histoire de donner des nouvelles

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la marquise de Sade
Léon le Wacky
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aline aubère
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeVen 30 Sep - 8:20

Léon le Wacky a écrit:
Jaissi a écrit:
Merci Léon, grâce à toi j'ai appris un nouveau mot : Tanathophobe. Ce bon vieux Robert m'a renseigné, et je ne manquerai pas de l'employer dans une prochaine soirée ce qui me donnera, je l'espère, l'impression de briller en société. C'est vrai, les gens brillants sont très utiles... en cas de panne d'électricité!

A ton service! hat J'ajoute, pour la petite histoire, que ce cher Eugène Ionesco était bien connu pour être tanathophobe... et il a fini par mourir à 85 ans, comme la première cantatrice chauve venue.

Vous en connaissez, vous, qui soient thanatophiles ?

AA
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeVen 30 Sep - 9:25

aline aubère a écrit:


Vous en connaissez, vous, qui soient thanatophiles ?

AA

Attention! Shocked Notions à manipuler avec précautions!
Depuis toujours il y a comme de l'ambiguité dans les rapports entre Eros et Thanatos!
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Gastonlebrave
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeVen 30 Sep - 13:06

Il semblerait néammoins que Saint Nicolas ne soit pas tout à fait de cet avis et que, chez les carabins, l'on considère une belle érection comme une preuve tangible de vitalité...
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MessageSujet: l'étoile   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeVen 30 Sep - 18:42

L'Etoile




La bouche du R.E.R m'avait vomi, ainsi que quelques milliers d'autres, sur l'esplanade de la Défense. J'avais l'impression de marcher au milieu d'un peuple de fourmis, besogneuses, s'empressant vers leurs tâches. Ils avaient tous l'air de savoir vers où et vers quoi ils allaient. Moi pas.
C'était la première fois que je mettais les pieds dans cet endroit, et je me suis vite senti perdu entre ces tours et ces masses phénoménales, implacables emblèmes de la nouvelle architecture urbaine. Petit. Petit et seul sous le vent glacé de l'hiver qui se faufilait entre les colonnes géantes de verre, de béton et d'acier, j'ai fait quelques pas en essayant de me repérer. En fait, je désirais me rendre à l'Etoile, et j'avais tout bêtement raté ma station. Je n'eus pas le coeur de reprendre le R.E.R et décidai, après m'être réuni avec moi-même, à l'unanimité plus une voix intérieure, qu'un peu de marche à pied me ferait le plus grand bien.
Je remarquai alors un drôle de chaland qui portait un chapeau avec une plume verte. Il semblait faire une tâche de couleur au milieu des autres qui évoluaient en noir et blanc, mais personne, à part moi, ne semblait remarquer sa singularité. je lui demandai :

- Excusez-moi, pourriez vous m'indiquer où est la place de l'Etoile s'il- vous-plait?

L'homme sembla surpris par ma demande. Après un petit instant, il répondit d'une voix teintée d'un accent dont je ne sus déceler l'origine:

- La place de l'étoile? Mais... dans le ciel, voyons! Mon ami! Où voulez-vous qu'elle soit? Mais permettez que je présente... Alfred Lapalace, je suis représentant en scoubidous.
- Ah oui, fis-je intrigué, en scoubidous? Ces fils en couleurs qu'on entortille?
- C'est cela même. Mais il faut pas être mou du doigt. Seriez-vous un amateur?
- J'ai dû jouer à ça quand j'étais môme, je pensais, pour tout vous dire que c'était passé de mode.
- C'est exact jeune homme. Sur terre en tous cas.
- Ah! Tiens donc! Et où les vendez-vous donc? Demandai-je de plus en plus amusé.
- Mais... sur Alpha du Centaure! Répondit-il avec une certaine fierté. Je suis le représentant exclusif du scoubidou pour toute cette partie de la galaxie.

J’ai réalisé que j’avais là à faire à un drôle d’oiseau, mais il semblait particulièrement inoffensif, et je décidai de jouer le jeu :

- et... les affaires vont bien?
- C'est un peu mou du ventre en ce moment, c'est pour ça que j'ai pris une petite année sabbatique. Imaginez... Ca fait cent cinquante ans que je n'avais pas revu Paris.
-Ca a dû vous paraître changé? Fis-je, finalement ravi par les propos du bonhomme qui faisaient joyeusement dérailler le train-train du quotidien.
- C'est pas que je sois mou de la mémoire, mais il y a certains quartiers que j'ai effectivement du mal à reconnaître.
- Et, vous comptez rester longtemps dans la capitale?
- Oh... je vais, je viens, en fait, je cherche la poule aux dents bleues.
- Ah oui... heu...pourquoi?
- Parce qu'elle a croqué ma jeunesse. Je les trouvais pourtant jolies ses petites quenottes, le temps de me retourner... hop! Disparue! Depuis, je suis un peu mou du… Enfin, vous voyez de quoi je veux parler ? J'aimerais bien lui dire ma façon de penser. Ah! La garce! Le pire, c'est que je l'aime encore. Vous ne l'auriez pas vue par hasard?
- Heu... non, moi je cherche l'Etoile.
- Ecoutez jeune homme, vous m'êtes sympathique, je suis garé tout près, je vais vous déposer.

Je n'ai jamais fermé ma porte au hasard ou à la curiosité. Il était clair que je me trouvais en présence d’un doux dingue, peut-être pas haut, mais fortement en couleurs. J'acquiesceai donc volontiers à son offre. Après tout, je n'étais pas pressé, et, qui plus est, l'homme m'amusait énormément. Je le suivis donc au travers du dédale de béton jusqu'à ce que nous parvînmes à une passerelle au bout de laquelle se trouvaient les quais de la Seine. Il s'arrêta à côté d'un véhicule orange vif d’une marque que je ne connaissais pas. Elle avait vaguement la forme d’une sorte de grosse Coccinelle. Il y pénétra et m'invita à faire de même.

- J'espère que vous êtes pas mou du coeur? Me demanda-t-il?
- Je suis mou de pas mal de chose, lui dis-je, mais pour le coeur, ça va!

A partir de là, tout est allé très vite. Il a mis le contact et nous avons immédiatement pris de la vitesse. A ceci près que nous ne roulions pas, nous volions. En fait la voiture a quitté le sol, propulsée dans les airs comme une balle de carabine. Il a suffi d'à peine quelques minutes pour que je voie la terre, petite boule bleue, rapetisser dans mon rétroviseur. Une chance que j'aie mis ma ceinture ai-je alors pensé.

- Au fait, me lança négligemment le fameux Alfred, vous ne seriez pas un peu mou du chapeau? Vous m'avez dit que vous vouliez aller à l'étoile, mais vous avez oublié de me préciser laquelle...?
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeSam 1 Oct - 13:01

La suite! bravo

L'est pas mou de l'inspiration, notre Jaissi!
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MessageSujet: La boule noire   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeDim 2 Oct - 20:13

La boule noire.



Je ne sais pas quand, où, ni comment j'ai attrapé cette chose là. Toujours est-il qu'elle a pris ses quartiers chez moi, et que je suis maintenant forcé de composer avec elle.
Chose. Au fond, comment appeler autrement cette boule noire et visqueuse qui s'est mise à grandir de jour en jour sous mon aisselle droite et qui a presque atteint aujourd'hui la taille d'une balle de tennis.
Le jour où je découvris son existence, elle n'était guère plus grande qu'un petit pois. Epouvanté, ma première idée fut, bien sûr, de courir consulter mon médecin afin qu'il trouve un moyen de me débarrasser au plus vite de cette saloperie. Une force que je n'ai jamais pu m'expliquer m'en a empêché.
J'ai vu ainsi, avec autant d'horreur que d'impuissance, se développer sur moi ce corps étranger au fil des semaines.
Depuis que cette chose est là, je ne suis plus le même. J'ai perdu le bel entrain, l'enthousiasme que je me connaissais. La moindre initiative se voit couper les ailes, le moindre élan est tué dans l’œuf. Toute entreprise est vouée dès le départ à l'échec, sitôt l'idée émise, je me sens submergé par une vague de profonde lassitude, je me sens flotter dans un état cotonneux, nauséeux, dans lequel finit par se dissoudre tout projet, quel qu'il soit.
Je ne vois plus personne, famille, amis, j'ai même cessé de me rendre à mon travail. C'est comme si je réalisais l'inutilité des actes qui faisaient pourtant mon quotidien avant que cette chose ne me visite.
Il me reste juste le courage de sortir, au moins une fois par jour, pour faire quelques provisions ou pour traîner ma déprime dans les ruelles de mon quartier.
Je ne me suis jamais vraiment habitué à sa présence, mais j'éprouve à la longue une sorte de dégoût blasé pour cette compagne indésirable, et pourtant si diablement présente.

--------------------------------------------------------------------------------------------------

Biza... tu m'entends? Oui, tout va bien. Nous serons bientôt adultes et alors nous pourrons nous connecter... je t'aime Biza... moi aussi j'attends ce moment avec impatience...

--------------------------------------------------------------------------------------------------

Je ne sais pas ce qui m'a poussé à adresser la parole à cette fille dans la rue. Ce n'est pas dans mes façons, je serais d'un naturel plutôt timide. Je dois avouer aussi qu'il ne me viendrait pas à l'idée d'emmener une fille chez moi en ce moment. La chose que je cache ne m'incline pas particulièrement à dévoiler une intimité dont j'aurai si honte. D'autant plus que la chose a encore gonflé. Elle a pratiquement doublé de volume.
Et pourtant je l'ai fait. Etait-ce moi qui parlait quand j'ai proposé à cette fille de m'accompagner? Le plus fou dans cette affaire, c'est qu'elle m'ait suivi.
Je ne peux pas dire que nous ayons été très loquaces durant le trajet qui nous conduisait chez moi. A peine lui ai-je demandé son nom après l'avoir renseigné du mien, ce dont elle eut l'air de se ficher complètement. Je crois que ce fut là toute notre conversation.
C'était comme si le destin avait programmé cette rencontre, nous épargnant tout le rituel préliminaire qui fait que deux êtres se retrouvent deux heures, deux jours, ou deux ans plus tard dans la même chambre, dans le même lit. Il y avait juste un seul bémol: La fille en question -je ne sais même plus son nom- n'avait pas grand chose à voir avec le genre de fille que j'aurais aimé fréquenter. Pour tout dire: elle ne me plaisait pas du tout.

--------------------------------------------------------------------------------------------------

Biza... mon amour, la connexion est imminente, grande est ma joie. N'entends-tu pas toquer mon skada? Hummm... je sens vibrer tes moïssols... ça vient mon amour... patience... attends… encore un tout petit peu de patience.

--------------------------------------------------------------------------------------------------

Il y a d'abord eu ce petit silence gêné quand nous sommes arrivés chez moi. Puis, tout naturellement, elle a commencé à ôter son ample tunique, bien trop grande pour elle, au moment même où je quittais le pardessus, bien trop grand pour moi, que j'avais enfilé avant de sortir pour cacher ma difformité.
Nous avons eu simultanément le même effarement au constat des boules noires que nous possédions respectivement sous les aisselles. Il s'est alors passé une chose extraordinaire: Nous nous sommes sentis attirés l'un vers l'autre, nos boules sont entrées en contact et, durant quelques minutes, nous avons été soudés par leur intermédiaire. Elles se sont mises alors à vibrer, d'abord lentement, puis de plus en plus vite. De noire, leur teinte est passée à l'oranger, puis au rouge vif. Je vivais, et ma compagne aussi j'imagine, cette scène comme un cauchemar, pourtant, je ne pouvais pas crier. Nous étions elle et moi comme tétanisés.
Ce qui s'est passé après? La fille s'est revêtue puis a quitté ma chambre sans rien dire, en lorgnant vers ma personne un dernier regard dégoutté.

--------------------------------------------------------------------------------------------------
Alors... Heureuse? C'était bien non? Non, ma petite Biza, on ne peut pas savoir tout de suite... mais il ou elle sera bien noire, bien ronde, et bien gluante... je te le promets...
--------------------------------------------------------------------------------------------------

Pour moi, la vie continue. Depuis quelque temps la chose semble diminuer de volume, j'ai bon espoir qu'elle disparaisse. J'ai du mal à ne pas penser à cette scène que j'ai vécue avec cette inconnue. C'est étrange, mais j'ai le sentiment que la chose qui a prit racine en moi est de sexe masculin. Je sais, cela peut paraître mesquin, mais j'en éprouve comme une sorte de soulagement: Le bébé sera pour elle.../
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeVen 7 Oct - 23:34

rireéclat

Ben, moi, j'ai eu une énorme ampoule sur le dessus du pied droit cette semaine; ça veut-y dire que je suis pédestrement enceint? zecépas
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeSam 8 Oct - 19:06

Si tu devais accoucher d'un pied, mon cher Léon, j'espère, pour le moins, que ce serait un "pied beau"!
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MessageSujet: Hôtel du Nord   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeJeu 13 Oct - 23:48

Hôtel du sud




Je venais de me faire engager comme réceptionniste dans un de ces petits hôtels cossus sur les bords de la Riviera. Le directeur des lieux, un certain monsieur Bodinger, m'avait bien sûr fait subir un entretien d'embauche durant lequel il s’appliqua à m’interroger. Rien que de très normal. J'avais toutefois été surpris et amusé par certaines de ses questions : il m'avait notamment demandé si je croyais à la réincarnation, si j'aimais le boudin avec les frites, ou si j'avais déjà rêvé de me transformer en pelle à tarte. Je ne m'en suis pas formalisé devinant que derrière ce curieux questionnaire se cachaient probablement quelque test psychologique. Je dus d'ailleurs fort bien m'en tirer puisqu'on m'autorisa à commencer sur-le-champ. Monsieur Bodinger tint cependant à m'avertir que son établissement était fréquenté par une clientèle peu ordinaire. Que des gens triés sur le volet.

- Quoiqu'il arrive, me prévint-il, il vous faudra toujours rester respectueux, même si certains agissements vous échappent.
- Pas de problème monsieur Bodinger, lui ai-je dit de mon air le plus entendu, ne vous inquiétez pas, je saurai me montrer digne de la confiance que vous portez en moi.
- J'espère bien, avait-il répondu. Et il faudra aussi me couper cette moustache !

Je n'avais pas bien compris le sens de son préliminaire quant aux mystérieux agissements de sa clientèle, mais j'ai fait comme si. Quant à sa réflexion sur ma moustache, je dois dire que c'est resté un vrai mystère, puisque je n'en portais pas.


Il n'y avait pas foule en cette période d'arrière saison. Juste quelques clients huppés, âgés pour la plupart, qui tentaient de tuer leur ennui entre la piscine, le bar, et le restaurant. Les pauvres gens !
Si j'avais bien compris, mon travail consistait strictement à ne rien faire si ce n'était afficher ma présence, et me montrer attentif, et disponible à la moindre sollicitation de la clientèle.
Je rêvassais déjà depuis une heure, plié sous le poids de mon inactivité quand surgit dans le hall un personnage étrangement vêtu. Un mélange de Kit Carson et de Davy Crockett, coiffé d'une toque en peau de castor, carabine à l'épaule, cartouchière sur le poitrail et chaussé de Santiags. Il tenait par les oreilles un lapin, tout ce qu'il y avait de plus mort, qu'il déposa sur le comptoir de la réception.

- Salut ! Me dit-il, t'es le nouveau ? Il me proposa une grosse main cailleuse à serrer et ajouta : "moi c'est Billy, je suis le chasseur de l’hôtel."

Interdit, je pris la main qu'il me tendait. Je concevais que tout hôtel respectable disposât d'un chasseur, mais celui là semblait avoir pris son métier au pied de la lettre.

- Pas facile en ce moment ! Déclara-t-il après avoir émis un formidable rot.
- Ah ! Oui ? Et que dois-je faire du... interrogeai-je en désignant la dépouille du lapin.
- Tu monteras ça au taulier. Bon, c'est pas que j'm'ennuie, mais faut qu'j'y r'tourne ! Fit-il en quittant la réception et en laissant sous mes yeux ébahis l'animal encore sanglant.

J'appelais immédiatement monsieur Bodinger afin de lui signaler l'incident. Quand je lui fis part de la venue de ce Billy, il ne fut pas autrement surpris et me demanda ce qu'il avait ramené.

- Un lapin, lui ai-je répondu.
- Ah ! Il se fait vieux ! Commenta-t-il avant de raccrocher.

En attendant d'autres instructions, j'ai mis le pauvre animal dans le bureau attenant à la réception, et j'ai nettoyé tant bien que mal les traces de sang sur le marbre du comptoir. Pendant que je m'attelais à cette tâche, un homme mince, très élégant, aux cheveux légèrement grisonnants, était sorti du restaurant et se dirigeait maintenant vers moi d’une démarche lente mais altière. Il me demanda d'une voix bien timbrée :

- Dites moi jeune homme, pourriez-vous m'indiquer où se trouvent les toilettes ?

Trop heureux de pouvoir me montrer enfin utile a quelque chose ou à quelqu'un, je pris un vrai plaisir à lui en indiquer la direction. Je m'attendais à un banal merci de sa part, mais il resta planté devant moi à me regarder. Il ajouta en appuyant sur les mots :

- Vous parlez bien du cabinet de toilette ?
- Assurément monsieur, ai-je répondu, quelque peu surpris devant son insistance.

Il ne bougeait toujours pas. Pourtant mes explications étaient on ne peut plus claires : au bout du couloir à droite. Que pouvais-je lui dire de plus ? Il me cloua soudain sur mon siège quand il m'assena :

- C'est parce que j'ai envie de faire caca !
- Ah ! Oui... Dans ce cas... dans ce cas, il faut y aller, ai-je dégluti, ne m'attendant certainement pas à une précision aussi crue.
- Vous croyez vraiment que c'est raisonnable ? J'ai quand même plus de soixante ans… Ajouta-t-il de sa voix très posée néanmoins teintée, pour le coup, d’une légère indignation.

Honnêtement, je ne voyais pas le rapport. C'est à ce moment là que j'ai commencé à me poser de réelles questions quant à l'endroit où j'avais atterri. Les propos de Bodinger m'avait déjà mis la puce à l'oreille, mais depuis Davy Crockett et ce vieux beau, les choses semblaient se confirmer : derrière la façade de cet hôtel se cachait assurément un asile d'aliénés.
En attendant, je ne savais pas comment j'allais faire pour me dépêtrer de l’homme qui piétinait face à moi. Allait-il maintenant me parler de ses problèmes de transit intestinal ou me demander de lui mettre du talc sur le derrière ?
Je fus sauvé par le gong, ou plutôt par la sonnerie du téléphone. Je me suis accroché au combiné comme à une bouée. Mon "allô, la réception j'écoute..." a dû décourager le client puisqu'il est retourné, à cloche-pied cependant, vers la salle de restaurant, semblant tout à coup oublier ce pour quoi il était venu.
Pendant ce temps, à l'autre bout du fil, une dame à la voix stridente m'a réclamé la réception de toute urgence. Avec toute la patience dont je me croyais encore capable, j'ai confirmé à mon interlocutrice qu'elle était justement à la réception, et je lui ai demandé ce que je pouvais faire pour elle. Je fus à peine étonné quand je l’entendis me réclamer qu’on lui monte, sans plus attendre, un velouté de crème de limaces.

- Où voulez-vous que je trouve un truc pareil ? M’entendis-je répondre, ça doit être dégouttant ?
- Détrompez-vous jeune homme ! Glapit-elle, c’est une spécialité du chef. Vous êtes nouveau non ? Vous connaissez l’Alaska ?
- Heu… non Madame… je dois dire que…
- Non ? et bien montez moi plutôt une soupe aux dents !

Pendant que j'entretenais cette palpitante conversation avec ma cliente, Billy, le chasseur repassa avec le cadavre d'une biche sur l'épaule, qu'il déposa derrière mon bureau, après m'avoir adressé un clin d’œil complice. Halluciné, je raccrochai machinalement, oubliant pour le coup mon interlocutrice.
Mais je n’étais pas au bout de mes surprises : A peine le chasseur fût-il sorti, que je découvris, surgissant dans le hall, un authentique joueur de rugby en tenue, son ballon sous le bras. Je n’eus pas le temps d’ouvrir la bouche qu’il avait déjà déposé son ballon ovale sur une espèce de cale et qu’il prenait son élan pour shooter. L’homme n’était pas maladroit, puisqu’il ne rata pas le grand lustre qui éclairait le hall. Celui-ci s’éparpilla en mille éclats sous l’impact alors que quelques clients, sortis de la salle de restaurant, applaudissaient l’exploit en connaisseurs.
Pendant que le joueur saluait modestement ses supporters, j’appelai évidemment Bodinger pour lui relater les faits.

- De quel couleur est son maillot ? Me demanda-t-il ?
- Rouge à pois bleus.
- Très bien, alors c’est un des nôtres, félicitez-le de ma part.

Et il raccrocha. J’avais bien compris que ma santé mentale ne résisterait pas bien longtemps si je restais davantage dans un tel endroit. En catimini, j’ai enfilé mon blouson, essayant de me faufiler le plus discrètement possible vers la sortie.

Je n’ai pas très bien compris pourquoi dehors il faisait nuit noire. Cela m’eut certainement semblé normal en d’autres circonstances mais je me dois de rappeler que nous étions en début d’après-midi. Non seulement la nuit était noire mais, d’après ce que j’avais pu en voir, je n’étais plus dans une ville au bord de la mer, mais dans une espèce de toundra remuée par un vent glacial et violent. Le froid était si vif que mes petits vêtements d’été étaient, contre lui, d’une protection ridicule.
Au bout de quelques secondes, j’entendis se rapprocher, d’abord sourdement puis de plus en plus présent, le bruit d’une sorte de cavalcade, assorti de cris sauvages et violents sortis d’on ne sait quelles gorges haineuses. Sans me poser plus de questions, je décidai de battre en retraite, estimant l’endroit pour le moins inhospitalier.

- Mets-toi à couvert !

Entendis-je soudain dans mon dos. La voix me sembla familière. Je reconnus en effet dans la pénombre Billy, le chasseur de l’hôtel, qui me pressa de me cacher avec lui à l’abri dans un fourré.

- Ce sont les Mollocks… m’expliqua-t-il, une tribu d’anciens psychanalystes retournée à la vie sauvage. Méfie-toi petit, ces gars sont sans pitié.

J’étais bien avancé, coincé dans les herbages contre cet énergumène duquel émanait, je dois le dire, une assez forte odeur de pisse, à tenter d’échapper à la folie criminelle d’une horde de psychiatres en goguette.
Le bruit de la cavalcade s’intensifia jusqu’à me faire penser que les chevaux allaient immanquablement nous piétiner, puis, il décrut après avoir atteint son apogée. Le pire, c’est que je n’avais rien vu.

- Il serait peut-être temps de me fournir une explication, proposai-je à mon compagnon. Pouvez-vous me dire, avec des mots simples, ce que nous fichons ici ? C’est quoi cet hôtel, et tous ces gens bizarres qui sont dedans ? Et vous, qui êtes vous ? Parce que dans le genre bizarre, vous vous posez là, vous aussi !
- Toi, t’es vraiment un bleu ! Alors… t’as pas compris ?
- Mais enfin… Qu’est-ce que vous voulez que je comprenne ? Depuis que je suis entré dans ce fichu hôtel, j’ai l’impression que la raison a complètement basculé.
- C’est pourtant simple : L’hôtel appartient à un écrivain.
- Ah ! Bon ? Et alors ?
- Ca va te surprendre petit, mais de cet hôtel, il en a fait un livre, et tous les gens qui ont le malheur d’entrer dedans deviennent ses personnages.
- C’est une plaisanterie ?
- Pas du tout ! Nous vivons tous au gré des fantaisies et des fantasmes de cet auteur. Un disciple de Ionesco. Entre nous soi-dit, je le trouve assez mauvais.
- Il est nul, vous voulez dire ! Depuis ma venue dans son hôtel, je bascule dans le flot des pires incohérences…
- Que veux-tu ? On n’y peux rien… Ca, c’est son style. Oh ! Remarque, il y a pire. On aurait pu tomber dans un livre de guerre qui se passerait dans les tranchées de 14-18, ou bien dans un bouquin d’épouvante, avec des crimes sanguinolents à toutes les pages. Après tout, ici, c’est la quille. Faisons contre mauvaise fortune bon cœur.

Billy m’a ramené à la réception de l’hôtel. Il a vraiment été charmant avec moi et j’avoue que son discours avait quelque chose de rassurant. Il m’a notamment fait comprendre à quel point la vie dehors pouvait être barbante en comparaison de celle de personnage de roman. Bon, d’accord, l’auteur n’était pas un génie, mais il s’échinait quand même à nous faire vivre des choses qui échappaient aux banalités du quotidien de la plupart des être humains.
Billy ajouta qu’il n’avait eu aucun regret puisqu’il était entré dans l’hôtel en tant que facteur pour déposer du courrier, et qu’aujourd’hui, il se voyait vivre des trépidantes aventures auxquelles il n’aurait jamais osé rêver auparavant.



Dans le fond, il avait raison, j’ai fini par m’en convaincre au fil du temps. Rien de folichon ne m’attendait en dehors des pages de ce livre. J’étais juste un petit gars sans personne, sans travail, sans ambition, bref, sans avenir. Aujourd’hui, je dois bien reconnaître que ce n’est pas pareil. Chaque page tournée m’apporte son lot de surprises. En plus, j’ai l’impression que l’auteur m’aime bien. J’ignore encore le destin qu’il me réserve –le sait-il lui-même ?- mais je me plie volontiers aux circonvolutions hasardeuses de sa plume qui racontent une histoire que, sans lui, je n’aurais vraisemblablement jamais vécue.
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeVen 14 Oct - 0:33

S'il rencontre son jumeau : sera-t-il en présence d'un plagiat ?
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MessageSujet: Re: Histoire de donner des nouvelles   Histoire de donner des nouvelles - Page 5 Icon_minitimeSam 15 Oct - 23:26

chani a écrit:
S'il rencontre son jumeau : sera-t-il en présence d'un plagiat ?

Pas forcément... L'un des deux sera peut-être tout simplement le brouillon. souri2
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Histoire de donner des nouvelles
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